D'ÉQUITATION
(XVIIe‑XVIIIe SIÈCLES)
Alain Fabre, 2002‑
©Alain Fabre
Dernière révision: 23/10/04
Il ne sera pas
question ici de retracer l’origine des Académies d’équitation. Comme on le
sait, celles-ci firent leur apparition dans la péninsule italienne, et leur modèle sera imité plus tard ailleurs en Europe.
Federico Grisone, un des premier écuyers de renom,
fonda son Académie à Naples en 1532. Il ne fut certainement pas le premier,
mais il est demeuré dans les annales de l’équitation
comme un père fondateur. Son ouvrage, intitulé Gli ordini di cavalcare..., fut publié
en 1556, et la première traduction française date de 1559, ce qui fait de
celle-ci le plus ancien traité d’équitation en version française, bien avant La
Broue qui, en 1593-94, fut le premier qui écrivit directement en français un
manuel de ce type. Il est bien connu qu’à cette
époque, et jusque vers la fin du XVIe siècle, tous les gentilshommes
européens voulant parfaire leurs connaissances en équitation se rendaient à
cette fin en Italie.
Comme le souligne
Ellery Schalk dans son importante étude sur l’histoire du concept de noblesse en
France entre 1500 et 1650 (Schalk 1996), il existait cependant
quelques différences notables entre les académies italiennes et françaises. Alors que les premières étaient essentiellement des établissements
privés ouverts à toute personne ayant la bourse assez garnie, les académies
françaises d’équitation étaient destinées aux nobles. En outre, elles
devaient recevoir l’aval officiel du Grand Écuyer de France, qui délivrait son
autorisation (lettres de patentes) [1] .
Mais le rôle des académies françaises d’équitation,
contrairement à la situation en vigueur en Italie, ne se bornait pas à
l’enseignement de l’équitation. D’autres matières jugées indispensables
pour la formation de la noblesse y étaient présentes telles l’escrime, la
danse, les mathématiques etc.
La Roche (1929: 411) cite comme
probablement la première en date des Académies parisiennes d’équitation celle
de Jean Chéradame, professeur de grec en Sorbonne, qui se trouvait, en 1526, au
carrefour de la Croix-Rouge (angle des rues du Cherche-Midi et du
Vieux-Colombier, dans une zone où l’on retrouvera au fil du temps un certain
nombre d’Académies d’équitation). Cette information est
extraite d’ un ouvrage d’Arthur Christian intitulé Études sur le Paris
d’autrefois, mais la date indiquée par ce dernier auteur est 1536 (Christian 1907: 59). Les sources n'indiquent pas s'il
s'agit d'une académie "à l'italienne" (n'enseignant strictement que
l'équitation mais ouverte à tous) ou d'une académie "à la française"
(enseignant plusieurs matières outre l'équitation, et destinée à la noblesse).
Dans un ouvrage plus récent, Fierro
(1996: 663) affirme quant à lui que la première Académie parisienne
d'équitation existait entre 1594 et 1598, date à laquelle l'ambassadeur
vénitien Pietro Duodo en fait mention comme attirant chaque jour un grand
nombre d'élèves étudiant sous la direction du Grand Ecuyer du Roi. Il s'agit
véritablement d'une Académie "classique", car les matières enseignées
comprennent également, entre autres,
l'escrime, la musique et les mathématiques. Pietro Duolo est quelque peu
inquiété par cette effervescence qui, selon lui, et l'avenir lui donnera
bientôt raison, videra les Académies italiennes de leur contingent de jeunes
nobles français. Les dates mentionnées par Fierro sont donc contemporaines des
activités de l'Académie de Pluvinel, et il semble qu'il s'agisse bien
d'ailleurs de celle-ci, car la date de fondation de l'académie de Pluvinel est
précisément l'année 1594.
La grande majorité des
textes traitant des Académies ne concernent pas les Académies d'équitation,
lesquelles sont, malheureusement, les parents pauvres de la micro-histoire. Il
faut garder à l'esprit que les bâtiments utilisés comme manèges étaient avant
tout regardés comme fonctionnels, et n'aboutissaient pratiquement jamais dans
les registres écrits contemporains. La Grande salle du manège des Tuileries
doit cette exception à son utilisation de tribunal pendant la période
révolutionnaire, qui l'a rendue célèbre comme lieu historique du tribunal et
non comme école d'équitation. Les bâtiments des Académies d'équitation, considérés
sous l'angle utilitariste qui était de mise à l'époque, n'étaient pas plus
préservés que les autres, chefs-d'oeuvre ou modestes constructions, des
réfections, démolitions et reconstructions. Par conséquent, leur aspect
extérieur même devait être assez mouvant d'une époque à l'autre. Il n'y a pas
non plus raison de penser que la répartition extrêmement anarchique et peu
pratique des nombreuses institutions royales dans la capitale (aspect développé
dans Chagniot 1988: 20-24), n'ait
pas eu son pendant dans d'autres secteurs d'activités, comme les Académies
d'équitation: tel La Guérinière qui faisait, en 1715, à grands frais et à
crédit, l'acquisition de l'ancien jeu de paume de la rue de Vaugirard où l'on
avait autrefois donné des représentations des opéras de Lully, en faisait
démolir certains bâtiments et en construire des annexes, puis rachetait quatre
années plus tard les équipages d'un collègue malchanceux qui se trouvait en
difficulté financière. Vers 1733, La Guérinière déménageait et s'installait rue
de Tournon, à quelques centaines de mètres à peine de son ancien manège. Il y
restera une dizaine d'année avant de prendre la direction du manège des
Tuileries.
D'autre part, même des
monuments historiques de la magnitude des Grandes Écuries de Versailles étaient
fréquemment et sans vergogne requises pour y monter des spectacles, tradition
que le propre Louis XIV avait lancée dès le milieu du XVIIe siècle, du fait de
leur brillante acoustique (Fleury
1928: 65).
Comme on peut aisément
s'en rendre compte, tous ces bâtiments se prêtaient de bonne grâce à toutes
sortes de modifications: un hôtel particulier ou un jeu de paume devenant
manège moyennant les services toujours coûteux, on peut en être certain, d'un
architecte.
La grande majorité des
écuyers-académistes, tout comme les instructeurs d'équitation actuels, étaient
des gens besogneux et consciencieux, dont les activités équestres devaient
accaparer la plus grande partie de la vie active. Il n'est donc pas étonnant
que si peu d'entre eux aient eu le temps de rédiger des manuels d'équitation.
Leur mode de vie ne défrayait donc que rarement la chronique et si parfois nous
les voyons faire une furtive apparition dans les mémoires de journaux de
l'époque, leur biographie nous est très imparfaitement, en dans certains cas
totalement, inconnue. Hierarchiquement,
leur situation au sein de la noblesse était quelque peu ambiguë, étant donné
qu'ils "travaillaient" sans pouvoir être assimilés à des artistes ou
artisans. De ce fait, ils devaient représenter un échelon inférieur de la
noblesse, tout juste au-dessus des grands bourgeois.
Cruellement manquant de
ressources financières, le train de vie des écuyers-académistes n'a que peu
souvent attiré l'attention de leurs contemporains, ce qui tranche avec les
interminables descriptions des cérémonies mondaines qui ne nous épargnent aucun
détail sur les atouts et les parures de ducs et de duchesses à la personnalité
réduite à ces détails ("Madame la comtesse de P* portait..." et trois
pages plus loin: "Quand à Monsieur le duc de Ch*, il abordait un
somptueux...etc"). Ne nous méprenons point cependant sur la fonction
symbolique de ces si fastidieux récits, qu'on pourrait être tenté de comparer
aux chroniques mondaines du jet set dans un journal populaire de grand tirage,
mais qui ne sont, dans leur contexte, qu'une affirmation consensuelle du bon
déroulement de ces évènements, montrant que toutes les régles de bienséance et
de hiérarchie avaient été respectées à la lettre; à moins, au contraire, que la
description ne serve à attirer l'attention sur un petit détail, qui, bien que
tout à fait anodin (voire même invisible) pour le lecteur d'aujourd'hui, serait
immédiatement détecté par le crible d'un expert en décryptage des usages
nobiliaires. Il s'agissait donc bien d'un code symbolique destiné à la lecture
des nobles mêmes, et non pas comme aujourd'hui, de textes rédigés pour ébahir
le brave lecteur crédule.
Les écuyers-académistes
avaient donc acquis, dans le meilleur des cas, une réputation surtout orale,
susceptible par ailleurs d'être transmise aux générations postérieures, mais au
péril de se désintégrer complétement, voire de se transformer rapidement en
mythologie ou en une suite de clichés éculés, tels le cas de Louis Cazeau de Nestier (1684-1759), dont la réputation
de « grand silencieux » et quelques indications vagues sur sa position à
cheval ont trouvé l'écho jusqu'à L'Hotte
(et les auteurs postérieurs qui ne font que leciter) . Il est vrai que Nestier a
été immortalisé sur un très beau portrait peint par Delarue en 1751, et que de
nombreuses gravures de ce tableau ont contribué à le rendre célèbre
(relativisons: au moins auprès des cavaliers possédant une certaine culture
équestre). Mais est-ce vraiment
atteindre à la célébrité que de figurer sur une toile, certes de qualité mais
peu connue du grand public, de traîner comme un boulet une réputation de grand
silencieux et quelques autres clichés répétés invariablement d'auteur en auteur
sur la dignité de son assiette (les Anglo-Saxons ont une expression admirable
pour indiquer une telle attitude: to pay lip service)? Mais cette
nourriture est malheureusement celle dont une personne intéressée par
l'histoire de l'équitation doit le plus souvent se contenter. La difficulté de
présenter du matériel nouveau et original explique peut-être en partie la
désaffection presque totale parmi les historiens, pour ce type de recherches,
qui cependant devrait s'avérer être un champ de recherches prometteur et
innovant.
Dans l'état actuel de nos
connaissances, la plus grande partie de la substance des rares maîtres
équitants qui ont laissé oeuvre écrite est presque toute enfermée dans
celle-ci. Quant aux autres, ils ont été relégués purement et simplement aux
oubliettes. Il s'avère aujourd'hui indispensable, si nous voulons dépasser les
quelques informations éparses dont nous disposons, que des recherches de grande
envergure soient entreprises à travers les diverses archives et que soient
méticuleusement dépouillés les journaux et mémoires contemporains, tant publiés
qu'encore inédits, sur les Académies d'équitation et leurs équitants. Nous n'en
sommes malheureusement encore qu'à la période de balbutiement en la matière .
Sans ces études, nous sommes condamnés à ressasser éternellement ce que
d'autres, parfois historiens dilettantes et sans préparation scientifique, ont
écrit avant nous, c'est-à-dire, entre autres délits envers l'Histoire, de
répéter sans vérifier les sources originales ni tenter d'évaluer leur véracité.
Le doute cartésien, tant vanté mais si peu pratiqué par les Français, devrait
s'appliquer ici avec toute sa force.
A cet effet, je
souhaiterais attirer l'attention des autorités compétentes sur les difficultés
et une bureaucratie qui semble parfois insurmontable concernant l'accès des
personnes qui ne disposent que de peu de temps à Paris, aux ressources de la
Bibliothèque Nationale et des Archives Nationales de France. Par bonheur, j'ai
eu la chance d'avoir accès aux collections de la Bibliothèque royale de
Stockholm et à la celles de l'Université d'Uppsala, qui renferment de nombreux
trésors sur l'histoire (entre autres nombreux domaines scientifiques) des XVIIe
et XVIIIe siècles. Si ces pages ont quelque mérite, c'est bien à ces deux
bibliothèques, dont les collections, ainsi que l'amabilité et la compétence du personnel, m'ont beaucoup
aidé dans mes recherches. Ett hjärtlig
tack!
QUELQUES DÉFINITIONS
Furetière (1690). Cet
auteur, dans son Essai de dictionnaire universel, ajouta, après l'entrée
principale ACADEMIE (en majuscules), deux sous-entrées en petites capitales,
dont seule la première nous intéresse
directement:
« Se dit aussi des
maisons des Escuyers où la Noblesse apprend à monter à cheval, & les
autres exercices qui luy conviennent. Au sortir du College, on a mis ce
Gentilhomme à l'Academie. Guy
Allard dit que Pluvinel est le premier qui a étably en France des Academies pour apprendre à monter à
cheval. Il étoit du Dauphiné » |
Dictionnaire de l'Académie
française de 1694:
(1)
Entrées "ACADEMIE, ACADEMISTE":
(2)
Entrée "MANEGE":
« Exercice qu'on fait
faire à un cheval pour luy apprendre à manier. Un cheval propre au manege,
dressé au manege, bon pour le manege, mettre un cheval au manege. Il signifie
aussi, Le lieu où l'on exerce les chevaux pour leur apprendre à manier. Un
beau manege, le manege Royal, un manege couvert » |
Hurtaut & Magny (1779, Tome I: 177):
|
On pourra remarquer dans cette
définition l'absence de toute référence à La Guérinière, disparu moins de
trente ans avant la parution de cet ouvrage. Il faut
cependant garder à l'esprit qu'il était de rigueur, à cette époque, d'honorer
les autorités les plus anciennes et renommées, dans le cas Federico Grisone
(XVIe siècle), Antoine de Pluvinel (1555-1620), Salomon de La Broue
(1552-1602), et le duc de Newcastle (1592-1676), aux dépens des contemporains
ou de leurs prédecesseurs immédiats.
Hurtaut &
Magny (1779, Tome II: 718):
|
Marolles
(1677, apud Christian 1907: 57-58) écrivait « on le doit [le
gentilhomme qui avait étudié, jusqu'à l'âge de 15 ou 16 ans, le rudiment,
l'histoire ou la philosophie dans quelque collège] mettre à l'académie pour
apprendre à se bien servir d'un cheval, à tirer des armes & à danser ».
Et Christian d'ajouter: « Par malheur, l'apauvrissement de la noblesse au
XVIIe siècle l'empêcha souvent de mettre à profit son privilège: les élèves
descendaient parfois au nombre de deux ou trois, ne restaient pas longtemps. On comprend que les écuyers-directeurs ne pouvaient exister qu'en
faisant le commerce de chevaux ou le dressage pour les particuliers. Les
académistes devaient suivre un cours normal de deux
ans: en fait, ils atteignaient rarement ce terme. Les leçons d'équitation ne se
bornaient pas à mettre les élèves en selle, à les faire trotter ou galopper sur
une piste, mais à leur apprendre aussi les exercices de haute école qui
devaient en faire des cavaliers accomplis. Les académies exigeant un assez vaste emplacement, étaient, en général, situés hors
ville. Outre une habitation pour l'écuyer-directeur,
sa famille & ses pensionnaires internes, elles comportaient un manège
couvert, un autre découvert & une
carrière ».
SALOMON DE LA BROUE (1530?-1610?),
écuyer du duc d'Épernon avant d'intégrer la Grande Écurie du roi comme Écuyer
ordinaire, avait étudié l'équitation à Naples sous la direction de Pignatelli.
Il nous a laissé deux livres d'équitation, dont le dernier peut être considéré
comme son chef d'oeuvre: Le Cavalerice françois, contenant les préceptes
principaux qu'il faut observer exactement pour bien dresser les chevaux. Avis sur le devoir de l'escuyer de Grande Escuyrie (Paris 1602). Il est intéressant
de noter que l'ouvrage de La Broue contient également un projet d'académie
comprenant, en dehors de l'équitation, des disciplines comme les lettres et la
danse.
Salomon de La broue est, avec le grand écuyer anglais
William Cavendish, Duc de Newcastle, l'un des deux pères fondateurs de
l'équitation classique mentionnés par La
Guérinière (1733: 60-61) :
PIERRE DE LA NOUE (? - début du XVIIe siècle). Presque rien n'est connu
de la vie de cet écuyer, contemporain de Salomon de La
Broue et d'Antoine de Pluvinel, qui écrivit pourtant deux ouvrages
d'équitation: La Cavalerice françoise et italienne (Strasbourg, 1620) et
La Cavalerice françoise (Genève, 1624). Monteilhet (1979: 165) écrit que
Pierre de La Noue appartenaît peut-être à une famille
calviniste. Ceci pourrait à mon sens expliquer, tout
comme les lieux de parution de ses deux livres, la situation quelque peu
marginale et en retrait de cet écuyer, certainement encore accentuée après
l'assassinat d'Henri IV en 1610 et la recrudescence des antagonismes religieux
sous ses successeurs Marie de Médicis et Louis XIII. La partie de l'ouvrage de
Conrads (1982: chapitre I) sur les Académies d'équitation concernant La Noue est due, semble-t-il, à une méprise de l'auteur entre
François et Pierre de La Noue, et rien de ce qu'il dit ne touche à ce dernier.
Ceci est d'autant plus surprenant que cet auteur
identifie correctement Antoine de Pluvinel et Salomon de La Broue (Conrads 1982: chapitre II). L'ouvrage
de Conrads, qui par ailleurs révèle un travail de pionnier dans l'histoire
scientifique des Académies d'équitation, est malheureusement, sur de nombreux
points, entaché de confusions et d'erreurs de ce genre. Certes, il est parfois difficile de distinguer entre les Académies militaires
et les Académies d'équitation proprement dites, qui enseignaient l'Art du
manège, mais Conrads mélange ici, en dépit du titre de sa monographie, toutes
les Académies. Si Conrads semble avoir fait un tour pratiquement exhaustif de
toutes les Académies (militaires et ou d'équitation) des Cours des pays de
langue allemande, et s'étend même jusqu'aux Académies de Sorø (Danemark) et de
Turin, il ne fait qu'effleurer le territoire français, n'apportant presque rien
sur les Académies parisiennes qui, pourtant, étaient fréquentés par une
importante clientèle de jeunes nobles de divers pays européens. Pour illustrer
Paris, Conrads cite le Collège de Navarre et
l'Académie Royale de Richelieu! Conrads
nous en explique le fonctionnement, prouvant donc par cela qu'il ne la prend
nullement pour une Académie d'équitation, mais comme il n'en traite pas une
seule en dehors de citer les noms et les oeuvres de Pluvinel et de La Broue, le
lecteur est en droit de se poser quelques questions sur le choix du titre du livre
(pourquoi "Ritterakademien" et non "Akademien" tout
court?). Par contre, l'ouvrage de Conrads apporte quelques lueurs intéressantes
sur les Académies d'Angers, de Saumur, de Sedan, de Lunéville, de Nancy et de
Besançon, mais toujours en y jetant pêle-mêle des éléments concernant toutes
les Académies : Académies d'équitation, Académies
militaires, Académies
des Arts et des Sciences.
ANTOINE
DE PLUVINEL, né à Crest en 1552 (ou 1655)[2], fut envoyé à l'âge de
dix-sept ans[3]
à Naples, où il étudia sous la direction du célèbre écuyer Pignatelli[4]. Selon Christian (1907: 56), un certain Sourdis, écuyer de la Grande Écurie sous Charles
IX aurait été envoyé en Italie pour acheter des chevaux, emmenant dans sa suite
le jeune Pluvinel. A son retour en France, Edouard-Alexandre, duc d’Anjou (fils
de Marie de Médicis et de Henri II), reconnaissant les dons de Pluvinel, prit
celui-ci à son service en tant que premier écuyer. Lorsque Edouard-Alexandre
fut élu roi de Pologne en 1674, pour être envoyé pour une mission de quelques
mois en Pologne, celui-ci emmena Pluvinel avec lui. Survenue en 1675, la mort
de Charles IX, frère d'Edouard-Alexandre, obligea ce dernier à revenir en
France, toujours accompagné de Pluvinel, pour y être couronné sous le nom de
Henri III. Il gardera Pluvinel à ses côtés jusqu’à sa
mort, en 1589. Cette fidélité ne sera pas démentie par son successeur Henri IV,
qui mit Pluvinel à la tête des Grandes Écuries, tout en le chargeant de
l'éducation du futur Louis XIII.
1594-1789 (1802): MANÈGE DES TUILERIES. Dès
1594, Pluvinel avait reçu l'autorisation de fonder sa
propre Académie à côté des Écuries royales des
Tuileries. Pluvinel eut parmi ses étudiants, outre
le petit dauphin, Armand Duplessis, futur duc de Richelieu.[5] En 1612, pour le
mariage du roi avec Anne d’Autriche, on commanda à Pluvinel un carrousel, resté
célèbre dans les annales de l’histoire, qui eut lieu sur la place Royale, aujourd’hui
place des Vosges. Il existe plusieurs gravures la représentant, dont celles des
éditions de 1623 et 1625 de l’Instruction du roi.... Pluvinel mourut en 1620,
son manuscrit du Maneige Royal inédit. Une première édition
posthume parut en 1623, magnifiquement illustrée par le graveur flamand Crispin
de Pas.[6] Menou de Charnizay,
fidèle ami de Pluvinel, remarqua de nombreux défauts dans le texte, dus à un travail éditorial défectueux. Menou de
Charnizay décida de reprendre le texte original de Pluvinel, tout en conservant
les gravures de Crispin de Pas.
Cette nouvelle version de l'oeuvre de Pluvinel, définitive cette fois, fut
publiée en 1625 sous le titre L'Instruction du Roy en l'exercice de monter à
cheval. Antoine de Pluvinel épousa,
en 1599, Marie du Mansel, avec laquelle il eut
des enfants dont une fille, Gabrielle[7], qui eut trois maris
successifs: Robert Marion, baron de Druy et gentilhomme ordinaire de la Chambre
du Roi, Charles de Biencourt, seigneur de Poutrincourt, représenté sur
plusieurs planches de l’Instruction... puis,
en 1649, Pierre de Poix, écuyer de la Grande Écurie du roi. Ces informations
sur la descendance de Pluvinel peuvent être consultées sur le site www.chez.com/oligene/yvelines/releves/actes/seigneurs.html , lequel fournit deux sources bibliographiques: G. de
Rivoire de la Batie Armorial du Dauphiné, Lyon 1856, et La Chesnaye des
Bois, Dictionnaire de la Noblesse, Paris 1980 [=1770].
Signature d’Antoine de Pluvinel (Terrebasse 1911)
Après
l'Académie de Pluvinel, l'apogée des académies parisiennes se situe entre 1640 et 1690. On en compte neuf, dont sept dans
le seul Faubourg Saint‑Germain. Conséquence des guerres de Louis XIV, un décret du 22 décembre 1690 les
réduisit à deux seulement.
Au début du XVIIIe
siècle, un nouveau manège fut construit pour remplacer
l'ancien, celui où Pluvinel avait professé, aux Tuileries. L'architecte
était Robert de Cotte. Le manège fut destiné à l'éducation équestre du
jeune Louis XV avant sa majorité. Son
maître de manège était, en 1720, Gouyon de Legourman. A partir du retour du roi à Versailles, en
1722, et jusqu'à la nomination de La Guérinière,
l'état du manège était extrêmement dégradé.
Vue panoramique sur les jardins et le château des Tuileries.
On aperçoit, en haut à gauche, le terre-plein du manège.
1743:
ACADÉMIE DE LA GUÉRINIÈRE: en 1740, La Guérinière fut nommé Écuyer ordinaire du
roi. Trois années plus tard, Charles de Lorraine‑Armagnac, Grand Ecuyer
de France, nomma La
Guérinière à la tête du Manège royal des Tuileries. Le Plan de Turgo (1739)
montre la salle du manège, tout au long de l'actuelle rue de Rivoli, à la
hauteur de la Place Vendôme, prolongé par une longue carrière s'étandant
jusqu'au Palais des Tuileries, soit une longueur totale d'environ 450 mètres.
Les dimensions du manège couvert étaient de 64mx15,50m
(Liévaux 2000). L'ancien
manège (celui de Pluvinel), était quant à lui situé à la hauteur de l'église
Saint Roche (Plan de Mathieu Mérian, vers 1615).
Plan de Turgot (1739):
jardin et château des Tuileries. Le long de la façade
nord du jardin (Terrasse des Feuillants), on aperçoit l'édifice du manège (à la
hauteur de la Place Vendôme) et le terre-plein prévu
pour les exercices équestres entre celui-ci et l'angle nord-ouest du château.
Après la mort de La Guérinière (1751), son fils Anne‑Antoine,
formé à l'école de son père et l'ayant secondé, prit
la succession tout en restant cependant subordonné à son beau‑frère
François‑Ignace de Croissy (époux de Françoise‑Apolline Robichon de
la Guérinière, fille du Maître).
1758: Leurs activités durèrent sept ans, mais en
raison du départ de Croissy pour l'étranger, en 1758, celui-ci laissa le manège
au chevalier Jacques-Philippe Dugard (1708-1775), qui dirigeait jusqu’à cette
date l’Académie de la rue de l’Université (et de Verneuil).
1767: Dugard céda l’Académie, en plein essor, à son
neveu Louis Dugard, qui s’adjoignit Jean-Baptiste de Grimoult de Villemotte,
lequel, avec l’autorisation du prince de Lambesc, prit à son tour la tête de
l'académie en 1777 avec son frère cadet Henri‑Jacques.
1789: l'Assemblée constituante décida d'utiliser le
manège, avec les suites que l'on sait.
1802: l'année 1802 vit la démolition du manège pour permettre
le percement de la rue de Rivoli, ouverte en 1803. A la hauteur du 230 rue de
Rivoli, on peut lire la plaque commémorative du Manège, et
à la hauteur du 232, celle de La Guérinière apposée à une des arcades.
1605-1633: ACADÉMIE
BENJAMIN (1): Pierre (ou Benjamin. Y eut-t-il deux Hannique?) de Hannique [8], élève de Pluvinel,
installa son Académie d'Équitation dans l'hôtel d'Elbeuf, 7-9 rue des
Bons-Enfants. En 1633, le cardinal de Richelieu racheta le bâtiment et le fit démolir pour permettre la construction du
Palais-Cardinal. L'Académie de Benjamin fait l'objet d'une rapide mention dans
l'ouvrage de Christian (1907: 59).
Sur un plan de Paris moderne, l'emplacement de cette
Académie serait à côté du Palais Royal et en face de la Banque de France.
Pierre (Benjamin) de Hannique s'installera alors à l'Hôtel d'O, rue des
Hospitalières-Saint-Gervais.
1620-: À la mort de
Pluvinel, un de ses élèves, Benjamin de Hannique, prit
la succession du manège des Tuileries (Fierro
1996: 663). Hannique
aurait-il alors dirigé deux Académies à la fois?
1634-1747: ACADÉMIE
DE LA RUE DES CANETTES. Selon Hillairet
(1963, Tome II: 262), cette Académie aurait été dirigée successivement par
Mesmont (1647), Desroches (1689), Vendeuil (1691) et Jouan (1760). La chronologie
mentionnée par Hillarait laisse planer quelques doutes, d'autant qu'il ne cite
pas ses sources. Le premier des écuyers cités est Hugues de Villelongue, dit M. de Mesmon, seigneur de
Mesmon et de l’Eschelle, écuyer ordinaire de la Grande Écurie. Mesmon avait acquis les bâtiments de l’académie en 1634.
[voir plan de terre
del’Académie de la rue des Canettes]
En 1646, l’académie
de la rue des Canettes passa à l’association formée par Henri Dugard, dit le
chevalier du Gard, seigneur de Suzanneville, Trénemont et la Tour et Henri
Coulon, chevalier, seigneur des Cabins (ou Cabiaux), écuyer de la Grande
écurie. A sa mort, survenue en 1653, sa veuve vend ses
parts de l’académie à Henri Coulon.
Mesmon, bien que ne faisant pas partie de l’association, était cependant
présent le matin pour donner ses conseils. Il semble
que l'avant-dernier écuyer cité par Hillairet ait été Antoine de Vendeuil à
partir de 1690 ou 1691, qui, auparavant, dirigeait l'Académie de la rue de
Seine.
En 1705, son fils
François-Anne de Vendeuil,
qui sera, aux alentours de 1715, professeur de La Guérinière et
de son frère Pierre des Brosses de La Guérinière, prit la direction de
l'Académie. François-Anne de Vendeuil
sera par la suite, en 1747, nommé écuyer ordinaire au premier manège de
Versailles. Jean de Jouan reprit alors (1747) le manège de la
rue des Canettes. L'emplacement de l'Académie prolongeait le numéro 26
de la rue des Canettes, et s'étendait jusqu'à la rue du Vieux-Colombier, ce qui
correspond au côté Nord de l'actuelle place Saint-Sulpice. Les bâtiments de
l'Académie furent démolis plus tard pour former la place
Saint-Sulpice. On peut voir encore sur le plan de Pichon (1789), le couvent de
la Miséricorde, qui jouxtait ladite académie entre la rue des Canettes et la
rue du Vieux-Colombier [9]. L'Académie
de la rue des Canettes était l'une des deux académies royales subsistant après
le décret de Louis XIV du 22 décembre 1690. Le duc de Saint-Simon, alors
encore vidame de Chartre, fut dans sa jeunesse élève
de cette Académie.
1630-1686: ACADÉMIE
DE LA RUE DE CONDÉ: fondation d'une Académie d'équitation à l'angle de la
rue de Condé/ rue Neuve-Saint-Lambert et de la rue des
Fossés-Monsieur-le-Prince. Selon Hillairet
(1963, Tome I: 378), l'emplacement actuel correspondrait au numéro 5 de la
rue de Condé.
Après avoir quitté
l’Académie de la rue de l’Égout, Henri du Gard, dit le chevalier du Gard,
seigneur de Suzanneville, Trénemont et La Tour, s’associe avec Lepidio
Arnolfini (mort en 1657), originaire de Lucques (venu d'Italie dans la suite de
Mazarin), qui fut chargé vers 1647, de l'éducation équestre du jeune Louis XIV.
En octobre 1646, Henri du Gard reprendra, en association cette fois avec Henri
Coulon et avec la collaboration de Hugues de
Villelongue, dit Monsieur de Mesmon, l’Académie de la rue des Canettes.
A partir de 1657, et jusqu'en 1680, Bernardi (ou La Vallée, 1670?) prit la
succession du manège. Cette Académie est nommée sur le
plan de Bullet et Blondel (1676) "Fort des Académistes". Les bâtiments seront
détruits en 1686. En 1767, la décision prise par le prince de Condé
d'abandonner son hôtel particulier et tous ses terrains voisins et d'emménager
au Palais-Bourbon transformera définitivement toute la zone située entre les
rues Monsieur-le-Prince, Condé et Vaugirard, quartier qui convergera désormais
vers la nouvelle Comédie française (futur Odéon) à partir des rues Racine,
Casimir-Delavigne (aujourd'hui Voltaire), du Théâtre français (aujourd'hui de
l'Odéon), Crébillon et Regnard, percées en 1779 (Chagniot 1988: 158).
1633-1643: ACADÉMIE
BENJAMIN (2): Pierre (Benjamin) de Hannique, ayant dû abandonner son
Académie de l'hôtel d'Elbeuf, s'installa à l'Hôtel d'O, qu'il quittera en 1643.
L'hôtel d'O fut racheté par les religieuses augustines
en 1655. Le couvent fermera en 1795 et sera racheté par la Ville en 1813, qui y
percera deux rues: rue des Hospitalières-Saint-Gervais, parallèle à la rue
Vieille-du-Temple (à l'Est) et rue des Blancs-Manteaux ,
perpendiculaire à la rue Vieille-du-Temple.
1642: ACADÉMIE
DE LA RUE DE SEINE (Académie Du Plessis , puis
Vendeuil), rue de Seine. Fondée, en 1642, par Pierre du Vernet, sieur du
Plessis (Duplessis) (1620‑1696), qui quitta cette adresse, à une date
inconnue (?), pour s'installer au numéro 13 actuel de la rue de
l'Université. Duplessis
était, en 1661, Écuyer honoraire du roi, avant d'être nommé Écuyer ordinaire en
1667. Duplessis, en collaboration avec M. de Bournonville,
enseigna l'équitation au dauphin à partir de 1668. En 1667, on trouve
François du Gard de Longpré, seigneur de Suzanneville, Longpré etc. en
association avec Jacques Grout de Beaufort et René du
Vernet, seigneur de la Vallée et frère cadet de Pierre du Vernet, sieur du
Plessis, qui venait d’être nommé aux Grandes écuries. En 1671, cette Académie
était connue sous le nom d’”Académie de Beaufort et
Longpré”.
Antoine Joseph du
Gard (1656-1687) seigneur de Bainval et sixième enfant de Henri du Gard, s’associe
avec Hercule Bidault, seigneur de Rochefort, et François Baron, pour tenir
l’Académie de la rue de Seine. La société formée par ces écuyers est rapidement dissoute vers 1681. Antoine Joseph du Gard et Henri Bidault continueront à l’Académie de la rue Férou.
A cette époque
(1681), l'Académie de la rue de Seine passa aux élèves de ces écuyers, les
Vendeuil, Antoine d'abord (jusqu'en 1717), puis son fils François Anne, qui deviendra,
en 1747, Écuyer ordinaire de la Grande écurie de Versailles. Le fils de
François Anne de Vendeuil,
François‑Antoine Vendeuil, lui succéda de 1748 à 1755.
Antoine et François (ou François Anne?) déménageront
dix ans plus tard pour la rue des Canettes.
En 1687, la société
emménage dans ses nouveaux locaux de la rue de
l’Égout.
1681-1687 (?) : ACADÉMIE DE LA RUE FÉROU. Entre la rue de
Vaugirard et la place Saint-Sulpice, l’Académie de la rue Férou était située en
face de l’Académie de la rue des Canettes, de l’autre côté de la place
Saint-Sulpice.
Antoine Joseph du
Gard (1656-1687), seigneur de Bainval et sixième enfant de Henri du Gard,
quitte l’Académie de la rue de Seine pour diriger celle de la rue Férou, en
association avec Hercule Bidault, en 1681. Y enseignent, outre Antoine Joseph
du Gard et Hercule Bidault, Henri Coulon, Jean de Brassac, seigneur du Quesnay,
et Godefroy de Romance, sous-écuyer de la Grande écurie en 1675 (en
remplacement de M. Denots), puis écuyer du roi en 1679 (en remplacement de M.
de Saint-Ange). Godefroy de Romance était, par sa
grand tante maternelle, parent de Hugues de Villelongue à qui Henri du Gard et
Henri Coulon avaient acheté l’Académie de la rue des Canettes en 1646.
Peu après la mort
d’Antoine Joseph du Gard, l’Académie e la rue Férou
doit fermer ses portes.
1650: ACADÉMIE DE LA RUE DES
FOSSÉS-SAINT-GERMAIN-DES-PRÉS.
1631-1719: ACADÉMIE DE LA RUE DE L’EGOUT (dité également Académie Foubert), située carrefour
Saint‑Benoît/ rue de ou des Égouts. L'Académie fut démolie en 1730, et sur le terrain fut bâtie la pittoresque cour du Dragon,
démolie à son tour entre 1930 et 1935.
L'emplacement correspond au 50, rue de Rennes (cette partie de la rue de
Rennes recouvre la rue qui, à l'époque, s'appelait rue des Égouts), entre la place Saint-Germain-des-Prés, la rue St.-Benoît, le
Boulevard Saint-Germain, la rue de
Rennes et la rue du Dragon. Le tracé de la rue
Bernard-Palissy (appelée alors Petite rue Taranne) bordait, vers le sud,
l'emplacement de cette Académie, l'une des deux académies royales subsistant
après le décret de Louis XIV du 22 décembre 1690.
C’est à l’académie de la rue de l’Égout que Henri du Gard
(décédé en 1653), dit le chevalier du Gard, seigneur de Suzaneville, Trénemont
et La Tour, fit ses débuts en 1631. Henri du Gard fut le premier membre de sa famille à être écuyer du roi et diriger une académie
d’équitation à Paris. Il s’associera plus tard avec Arnolfini dans l’Académie
de la rue de Condé, puis dirigera, en 1646, celle de la rue des Canettes avec
Henri Coulon, chevalier, seigneur des Cabins (ou Cabiaux), écuyer de la Grande
écurie du roi, et Hugues de Villelongue, dit Monsieur de Mesmon, seigneur de
Mesmon et l’Eschelle, écuyer ordinaire de la Grande écurie du roi.
Dirigée de 1680 à
1719 par de François du Gard de Longpré (1631-1702), écuyer de la Grande écurie
du roi en 1664, après avoir été associé à l’Académie de la rue de Seine,
s’installe en 1687 dans les nouveaux locaux de la rue de l’Égout. Jean Bernardy, qui avait dirigé précédemment
l'Académie de la rue de Condé, rejoint l’association de la rue de l’Égout mais
cède ses parts à François du Gard de Longpré en 1698. Deux de leurs fils se succéderont dans cette
académie: François du Gard, seigneur de Suzanneville, Longpré, La Loutinière,
Warvillers et Auteuil, (1672-1743) et Jacques,
seigneur de Suzanneville (1678-1714). En 1719, l'Académie doit fermer ses portes. La
Guérinière rachète à François du Gard de Longpré, pour 24.000 Livres, les équipages du
manège.
|
A: Emplacement de
l'Académie Foubert jusqu'en 1730, date de sa démolition et remplacement par la cour du Dragon. B: Académie de la rue des Canettes (angle rue des Canettes/ rue du
Vieux-Colombier, qui correspond au côté nord de l'actuelle Place
Saint-Sulpice) (Plan de Deharme, 1763) (). à l'époque où elle était tenue par François
Anne de Vendeuil. |
1649: ACADÉMIE DE DELCAMPE: rue du Four et de la rue du Vieux-Colombier,
dirigée par le sieur Del Campo, écuyer d'origine espagnole, qui fut nommé Écuyer
ordinaire auprès de la Grande Écurie du Roi. Mennessier de La Lance (1915: 374)
situe l'Académie de Delcampe d'une manière assez précise, entre la rue du
Vieux-Colombier, au sud, celle du Four au nord, la Croix-Rouge à l'ouest et la
rue de la Petite-Corne (recouvrant approximativement la rue Bonaparte actuelle)
à l'est. Sur un plan actuel, l'emplacement de l'Académie de Delcampe devrait
donc être inclus dans le triangle compris entre le carrefour de la Croix-Rouge,
l'intersection de la rue du Vieux-Colombier avec la rue de Rennes, et celle de
cette dernière et de la rue du Four.
D'après Mennessier
de La Lance (op. cit.) Del Campo serait arrivé en
France vers 1640. Son Académie figure d'ailleurs sur le plan de Gomboust
qui, bien qu'édité en 1652, représente la situation en
1649. Del Campo, ayant francisé son nom sous la forme de Delcampe, publia un ouvrage intitulé L'Art de monter à Cheval, ou il est
desmontré la belle methode de se pouvoir rendre bon homme de Cheval. Ensemble
des remedes les plus efficaces pour les maladies des Chevaux. Par le Sieur Delcampe, Escuyer de la Grande Escurie du Roy.
A Paris chez Jacques le Gras, à l'entrée de la Galerie des Prisonniers, 1658,
qui fut réédité au cours du XVIIe siècle, avec certaines variations
dans le libellé du titre (seconde édition: 1664. Cette édition est la meilleure
selon Mennessier de La Lance;
troisième: 1671; nouvelle édition: 1690, 1691). Les deux premières
éditions sont dédicacées, comme il se devait à
l'époque, au Grand Écuyer de France Henri de Lorraine, comte d'Harcourt
(1601-1666) qui assura cette fonction entre 1643 et 1660. La partie
hippiatrique du livre, au moins à partir de la deuxième édition de l'ouvrage,
en 1664, est due à Samuel Fouquet de Beaurepère (?
-1678), écuyer de la Grande Écurie et apparenté au surintendant Nicolas
Fouquet. Mention explicite de cette coopération apparaît dans la partie finale
du titre de la seconde édition: [...] Augmenté d'une Seconde Partie, des
Remedes les plus efficaces pour les Maladies des Chevaux. Par Messire Samuel
Fouquet, Escuyer, Sieur de Beaurepaire, Escuyer de la
Grande Escurie du Roy. Toujours d'après Mennessier de La Lance, une place
de choix fut réservée à Delcampe lors des cérémonies de l'entrée de Louis XIV à
Paris le 26 août 1660.
1650: ACADÉMIE FORESTIER, RUE
DE SORBONNE.
1650: ACADÉMIE DE M. DE
TOISE: rue Neuve-Saint-Honoré.
1650-1713 (?): ACADÉMIES DE LA RUE DE L'UNIVERSITÉ.
Deux Académies étaient situées presque face-à-face, aux 12 (côté Nord) et 13 (côté Sud) de la rue de l'Université, ce qui paraît
avoir occasionné un certain nombre de confusions. Il ne semble pas que les
activités de ces deux Académies aient été, à quelque moment que ce soit,
contemporaines l'une de l'autre, l'Académie située au numéro 13 actuel de cette
rue étant probablement fermée depuis une dizaine d'années avant l'apparition de
celle du 12 de la même rue. Toutefois, il faut garder à l'esprit que cette dernière
avait été ouverte comme une annexe de l'Académie Dugast, qui, jusqu'à cette
date, n'était située que dans la voisine rue de Verneuil, les deux dynasties
d'écuyers (Duplessis/Duvernet et Dugast/ Dugard) ayant été, sans nul doute,
contemporaines.
(1) 12 RUE DE L'UNIVERSITÉ (CÔTÉ NORD). En
1702, Léon Bonaventure du Gast (ou Gard) loua cette maison comme prolongement
de son Académie de la rue de Verneuil, avec laquelle
elle communiquait. Ce bâtiment fut utilisé comme logement de l'écuyer et de ses élèves internes. Le fils de Léon Bonaventure du
Gast (ou du Gard),
Jean Léon Bonaventure (1700-1746), remplaça son père en
1733. A la mort de Jean Léon du Gard ce fut son frère cadet Jacques Philippe (1708-1775), dit le
chevalier du Gard (ou du Gast), qui reprit l’Académie.
La chronologie de cette famille d'écuyers est
assez embrouillée, ce qui provoque de nombreuses différences entre les auteurs.
Ainsi, selon Monteilhet (1979: 106), Bonaventure Dugard aurait été, avec Martin
Dugard (son frère?), écuyer ordinnaire de la Grande Écurie.[10] Le fils de
Bonaventure, Dugard de Longpré, dirigea de 1680 à 1716, le manège de la rue de
l'Université. A son tour, Léon Dugard reprit le manège jusqu'à sa mort en 1730. C'est alors que son frère cadet, Philippe
Dugard, prit la relève, jusqu'en 1758, date à laquelle il partit pour le manège
des Tuileries, où il remplaça Croissy, successeur de La Guérinière.
(2) 13 RUE DE L'UNIVERSITÉ (CÔTÉ SUD). Cette
académie avait été fondée par François du Vernet, sieur de Roquefort [second
des frères du Vernet] et Daniel François du Vernet rue de Seine avant d'être
transférée, sans-doute vers 1650, rue de l'Université.
1661:
ACADÉMIE COULON: rue du Pot-de-Fer, dans le voisinage immédiat de la rue
Mouffetard.
1670:
ACADÉMIE FORESTIER: rue Saint-Antoine.
1697-: ACADÉMIE
DE RUE DE VERNEUIL. L'histoire de cette Académie, située au 13‑15,
rue de Verneuil [entre les rues de Lille et de l'Université], est étroitement liée à celle du 12, rue de l'Université
(voir plus haut). Il s'agit de l'emplacement d'une académie de manège fondée en
1702 par Léon Bonaventure du Gast [ou du Gard] (1649-1730), seigneur de la Tour
et cinquième enfant de Henri du Gard. C’est à son sujet que Nemeitz (1727: 75-76) écrivait: "Cette Académie a quelque chose de
particulier, puisque la fille de Monsr. du Gast, qui
de mon tems fut une fille d’environ 18 ans,
fait le manége d'une façon admirable. Je l'ai vûë en présence du Pape Bentivoglio, &
en d'autres occasions faire tous les exercices à cheval; en quoi elle
surpassoit de beaucoup tous les écoliers, qui avoient appris déja longtems
auprès de son pére". Le Bentivoglio dont il
s'agit ici fut nonce du pape à Paris sous Louis XIV. Saint-Simon, dans son
style incisif inimitable, décrivait le cardinal Corneille Bentivoglio
(1668-1732) comme « le plus dangereux fou, le plus séditieux, le plus débauché prêtre et
le plus chien enragé qui soit venu d'Italie
».
Léon Bonaventure du
Gard fut d’abord formé vers 1671 par son cousin germain François du Gard en
l’Académie de la rue de Seine. Le 23 juillet 1681 il
reçoit son brevet d’Écuyer cavalcadour à la Grande écurie. En
1697, on le retrouve écuyer du prince de Conty. Quelques mois avant, il avait signé un contrat avec René du Vernay, seigneur de
la Vallée, écuyer de la Grande écurie, avec lequel il crée l’Académie de la rue
de Verneuil.
En 1702, souhaitant
s’agrandir, Léon Bonaventure du Gard loue une maison du côté nord de la rue de
l’Université (actuellement le numéro 12), et fait
construire des annexes sur d’autres terrains voisins. Les
baux sont prorogés en 1724. Son fils Jean Léon
Bonaventure (1700-1746) lui succédera rue de l’Université.
Dans la
littérature, la chronologie des membres de la famille Dugast (Dugard) est
sujette aux mêmes confusions
que pour leurs activités au 12 de la rue de l'Université (Hillairet 1963, Tome II: 620 vs.
Monteilhet 1979: 106). Je suis redevable à M. Alain
Baillon d’avoir eu la gentillesse de me comuniquer le dossier généalogique de
cette famille d’écuyers. A partir de
1759, cette Académie fut reprise par Dugier. En 1780, l'hôtel
de Bouville la remplaça (Hillairet, op.
cit.).
1715-1717. ACADÉMIE
DE LA GUÉRINIÈRE (1): rue de
Vaugirard (correspond à l'actuel numéro 13, indiqué en rouge par la lettre A
sur le plan de Turgot ci-dessous). La Guérinière et
son associé Jean‑François Colménil, trésorier de France à Alençon,
rachetèrent un jeu de paume en 1715. Après de longs travaux d'emmènagement,
réfection et la construction de nouveaux bâtiments,
l'Académie ouvrit ses portes en 1717. Les affaires de Colménil étant douteuses,
et ce dernier ayant fait appel à banque Law, La Guérinière connut, comme bien
d'autres, une période difficile au moment de la banqueroute de cette dernière
banque. Il finit d'ailleurs pare rompre avec Colménil et
s'associa avec François Nicolas Desprez en 1724. L'année
suivante, les difficultés financières reprirent, malgré le grand succés de
l'enseignement de La Guérinière. L'Académie donnait aussi des cours
d'anatomie et de chirurgie équine à cette époque (donc
avant Bourgelat).
1730-33 (?): ACADÉMIE
LA GUÉRINIÈRE (2): rue de Tournon
(hôtel Brancas ou Terrat, au numéro 6 actuel, indiqué par la lettre B sur le
plan de Turgot ci-dessous). A cette époque, Mesmont et
ses deux fils, avant leur départ pour les Ecuries Royales, y enseignèrent. La Guérinière y transféra son Académie en
1730. Il s'agit de l'emplacement d'un ancien hôtel reconstruit par Bullet en 1719 pout Terrat, marquis de Chantosme, chancelier
du Régent. Jusqu'en
1971, au fond du jardin de l'hôtel, était situé l'institut Tessin (bibliothèque
et musée d'art Suédois), transféré depuis au Marais (hôtel de Marle). Le
comte Carl GustavTessin, ambassadeur de Suède à Paris
entre 1739 et 1742, était très lié avec Boucher et sa femme, Louis Tocqué
(auteur des gravures du livre de La Guérinière), Lancret etc. (voir à ce sujet Tessin, 1983 [1739-42] et Wolff, 2001).
|
LES DÉBUTS DE LA GUÉRINIÈRE À PARIS. LE QUARTIER DU LUXEMBOURG. L'Académie de la rue des Canettes où La Guérinière étudia l'équitation et les deux académies successives où il enseigna, avant de s'installer
au manège des Tuileries, dans le quartier du Luxembourg situées d'après le plan de Turgot (1739): A: Première académie
de La Guérinière (1715- ?), rue de
Vaugirard B: Deuxière académie
de La Guérinière, rue de Tournon (à partir de 1730 ou 1733), hôtel Terrat (numéro 6 actuel) C: Académie de la rue
des Canettes |
1743: ACADÉMIE DE LA GUÉRINIÈRE (3): .
Nemeitz
(1727: 75-76) écrivait dans son ouvrage sur Paris à l’usage des étrangers :
|
|
Nemeitz s’adressait à des personnes “de qualité”
séjournant à Paris plusieurs mois, et l’emploi du
temps qu’il leur proposait était véritablement draconien, ce qui explique sans
doute qu’il leur déconseillat de trop s’adonner au manège, qui accaparerait
trop leur temps. Le Pape Bentivoglio dont il s'agit
dans la note en bas de page de Nemeitz, fut nonce du pape à Paris sous Louis
XIV. Saint-Simon, dans son style incisif inimitable, décrivait le cardinal
Corneille Bentivoglio (1668-1732) comme étant « le plus dangereux fou, le
plus séditieux, le plus débauché prêtre et le plus
chien enragé qui soit venu d'Italie ».
Plan de Pichon (1789): Partie Sud (zone Luxembourg/
St.-Germain-des-Prés-St.-Sulpice)
NOTES
[1] L'office de Grand Écuyer avait été crée en 1441
par Charles VII. L'un des sept grands officier du
royaume, il fut charger de superviser les écuries royales, le haras royal, la
maison des pages ainsi que les académies équestres parisiennes et provinciales.
Les nomminations à tous les emplois lui incombaient, à l'exception toutefois de
celui de Premier Écuyer -- appelé « Monsieur le Grand » -- nommé directement
par le roi. A partir de 1585, Henri III
sépara les services de la Grande et de Petite Écurie
et cette division subsista jusqu'en 1787, date à laquelle Louis XVI les réunit
de nouveau. La Grande Écurie hébergeait les chevaux de manège, de guerre et de
chasse ainsi que tous les services afférents, alors que la Petite Écurie était
chargée plus spécialement des chevaux de traits et servait de remises aux
carrosses et autre véhicules hippomobiles. Lorsque Louis XIV déménagea avec la
cour à Versailles, les deux écuries s'installèrent dans les deux bâtiments
construits entre 1679 et 1685 par Mansard, où nous
pouvons toujours les admirer. La Grande Écurie, redevenant école d'équitation
artistique sous la direction de Bartabas, a finalement repris ses activités en 2003.
[2] Pluvinel
serait né, selon Terrebasse (1911), en 1652. Saurel (1971) et Monteilhet (1979), entre atres auteurs, citent l’année
1955.
[3] Selon Monteilhet (1979),
Pluvinel serait parti pour l’Italie à l’âge de dix
ans, alors que pour Christian (1907) et Terrebasse (1911), Pluvinel aurait eu
dix-sept ans à l’époque.
[4] Loch
(1994) estime la durée du séjour de Pluvinel en Italie à six années.
[5] Terrebasse (1911) cite
également parmi les illustres élèves de Pluvinel César, duc de Vendôme,
Alexandre, dit le chevalier de Vendôme, fils de Henri IV et de Gabrielle
d’Estrée, Louis de Bourbon, comte de Soissons, Henri de Lorraine, comte
d’Harcourt et Grand Écuyer de France en 1643, François d’Esparbez de Lussan,
marquis d’Aubeterre, Gabriel de Rochechouart, marquis, puis duc de Mortemart et
Louis, comte de Maurt, frère du précédent.
[6] Crispian ou Crispin de Pas
ou de Paas (Crispinus Passaeus), dit le vieux, né à Armuyde, en Zélande
(1565-1637) se fit aider par son fils Crispian de Pas, dit le jeune
(1589-1667), lequel semble avoir été, selon Terrebasse
(1911), le
principal artisan des planches du livre de Pluvinel. Dans son Traité de perspective
(Amsterdam 1644), le fils de Pas dit avoir
enseigné le dessin à l’Académie de Pluvinel.
[7] Baptisée
en 1618. Pluvinel eut également une fille naturelle,
Marguerite. Le testament
de Pluvinel stipulait son union avec son serviteur Jean de Peyrol.
[8] Un problème récurrent ici est l'usage des noms propres de personnes à l'époque
étudiée. Tout ce que Georges Duplessis
(1892: 81) écrit, en épilogue à sa monographie sur la dynastie des graveurs
Audran est applicable à d'autres secteurs de la société, qu'il s'agisse des
ducs de Lorraine ou à d'un corps de métier comme celui des écuyers-académistes
(qui n'en formait d'ailleurs pas un au même titre que les artisans, mais qui
formaient cependant une catégorie sociale bien délimitée): « [...] nous
avons cherché à établir la généalogie de la famille Audran. La chose n'est pas
aussi simple qu'elle le paraît au premier abord. Une faute d'impression, un chiffre mis à la place d'un autre, dans un travail de
cette nature, déroute et bouleverse tout un système reposant sur une base qui
paraît absolument sûre. La similitude des prénoms qui dans une nombreuse
famille, comme celle-ci, se retrouvent presque à chaque génération, le titre de
graveur qui accompagne presque toujours ce même prénom, sont autant de causes
de confusion qu'il n'est pas toujours commode d'éviter ». À cela, il faudrait encore bien sûr ajouter les variations
orthographiques des noms propres!
Il faut souvent avoir recours à des documents non
publiés pour être certain de l'identité des individus dont il est
question. Dans certains cas, nous le savons, et de
source sûre. Ainsi, l'auteur de l' École de cavalerie est bien François
Robichon de La Guérinière, et non son frère, Pierre des Brosses de La
Guérinière, bien que l'auteur de l'École de cavalerie soit indiqué dans
ce livre comme étant « M. DE LA
GUERINIÈRE, Ecuyer du Roy » (frontispice) ou « Le très humble et très
obéissant Serviteur DE LA GUERINIERE » (signature de la dédicace à Charles
de Lorraine, Grand Écuyer de France). Suite à la Préface du livre, le Privilège du Roy se réfère à notre
auteur comme « le Sieur DE LA GUERINIERE ». De même, lorsque Nemeitz (1727: 76) cite « Monsr. de La Gueriniére » parmi les quatre maîtres d'équitation les
plus prisés du faubourg Saint-Germain, nous pouvons être sûrs de qui il s'agit.
Le cas est beaucoup plus complexe lorsqu'on a affaire
à une famille d'écuyers portant le même nom. Cette situation n'est d'ailleurs
pas l'apanage du domaine de l'équitation. Il en est de même, par exemple, pour
d'autres artistes comme les peintres, les graveurs, les sculpteurs, qui, eux
aussi, apprenaient leur métier de père en fils, et travaillaient dans des
ateliers familiaux entre parents, oncles, fils et frères, tous portant le même
nom. Cependant, même si bien des incertitudes demeurent, la vie de ces
artistes, à l'inverse de celle des écuyers, est relativement bien connue. Les
écuyers n'ont que rarement intéressé les historiens, qui ont préféré se pencher
sur des personnalités plus "palpables", l'oeuvre équestre prenant
fin, inéluctablement, et tout comme celle des acteurs et des
musiciens-interprètes, à la mort de l'artiste...jusqu'à l'invention de la
cinématographie qui a pu immortaliser l'Art d'un Maître contemporain comme Nuno
Oliveira.
L'usage des prénoms pour distinguer les membres d'une même famille ne
semblait pas très étendu en dehors et des actes de
naissance ou de décès ou de succession. Lorsqu'un auteur voulait signaler une
différence, il pouvait préciser "le Jeune" ou "le Vieux",
mais encore faut-il savoir de quel génération il est question. Nemeitz (1727: 73) écrit au sujet
d'un Maître de danse: « Un des Messrs. Dumoulin qui a un defaut sur l'oeil,
est incomparable pour la danse Grotesque ». Il fait suivre le patronyme
d'une astérisque renvoyant à une note en bas de page qui précise: « Il y a à
Paris 4. fréres de ce nom là, tous Danseurs de
l'Opera. Deux en sont très renommez, l'un en Grotesque, l'autre en canaries,
comme sont les gigues, les Bourrées, & autres danses de cette sorte ».
Les frères étaient donc distingués par le rôle dans lequel ils
étaient les meilleurs, et l'un par un défaut physique. Lorsque le même auteur
conseille à ses lecteurs étrangers visitant Paris de
suivre les cours d'équitation à l'une des quatre Académies du faubourg
Saint-Germain, il mentionne « Monsr.
Lomprés, Monsr. du Gast, Monsr. Vandeuil et Monsr. de la Guerinière ».
Il ajoute dans une note un des traits distinctifs de
l'Académie de M. du Gast, à savoir le remarquable talent équestre de la fille
de ce dernier. Mais s'agit-il de Bonaventure, de Jean-Léon ou
de Jacques-Philippe, ou peut-être encore d'un autre du Gast (écrit également en
un seul mot ou Dugard)? Il est évident qu'il
doit être question du plus vieux Dugast à l'époque où écrivait Nemeitz, et
quiconque voulait suivre les cours de cette Académie était certainement dirigé
vers celui des Dugast qui supervisait le manège. Mais Hillairet (1963, Tome II: 583)
affirme que Bonaventure du Gard avait loué un bâtiment rue de l'Université en
1702, qu'il fit communiquer, pour les réunir, avec son manège de la rue de
Verneuil. Bonaventure du Gard fut suivi, en 1733, par son fils aîné Jean-Léon du Gard. A
la mort de celui-ci, en 1737,
son fils cadet (on ne sait si Hillairet parle du fils cadet de
Bonaventure ou de celui de Jean-Léon, mais il appert de l'article sur les 13-15
de la rue de Verneuil qu'il s'agit de celui de Bonaventure) Jacques-Philippe
Dugard, prit la relève. La chronologie
des Dugast devrait être respectée pour l'Académie de la rue de Verneuil, mais Hillairet (1969, Tome II: 620), qui
parle maintenant de la famille du Gast, nous dit que Jacques-Philippe du Gast
prit la succession en 1746 . Monteilhet (1979: 106), par contre,
écrit que le fils de Bonaventure était Dugard de Longpré, qui dirigea
l'Académie de la rue de l'Université entre 1680 et 1716, après quoi le manège
fut repris par Léon Dugard, petit-fils de Bonaventure, jusqu'à sa mort, en
1730, puis par son frère le chevalier Philippe Dugard, jusqu'en 1758/59, année
où il fut nommé à la tête du manège des Tuileries, en remplacement de Croissy,
héritier de La Guérinière. Comme aucun de ces auteurs ne cite ses sources, il est extrêmement difficile de vérifier.
D'autre part, un certain va-et-vient des écuyers à la
tête ou au service de différentes Académies semble avoir été la règle plutôt
que l'exception. De plus on doit supposer également un
circuit d'échange de femmes entre les différentes familles d'écuyers. Ainsi,
par exemple, ce Dugard de Longpré, fils de Bonaventure selon Monteilhet (op.
cit.), qui dirigea entre 1680 et 1716 le manège de la rue de l'Université,
était-il apparenté au François du Gard de Longpré cité par Guillotel (2000: 19), qui revendit à
La Guérinière, en 1719,
les équipages de son Académie de la rue de l'Égout (ou des
Égouts) qui venait de fermer. Il pourrait même s'agir de la
même personne. Une autre incertitude plane sur la relation entre les
différents Vendeuils, dont Antoine semble avoir été le père, mais quels étaient
les rapports entre ses fils et/ou leurs descendants
François, François-Antoine, François-Anne? Le problème de l'élucidation des
noms propres est donc une source constante de
confusion, à laquelle il faut prendre garde à chaque pas, et qu'il faudrait
tenter de démêler le mieux possible avant d'être en situation d'avancer quoi
que ce soit de définitif en la matière.
Je dois les informations concernant la généalogie des Du Gard et d’autres écuyers ayant collaboré avec cette famille à la
générosité de M. Alain Braillon, que je remercie vivement.
[9] Selon Liévaux
(2000: 57, note 122), l'académie de Jouan ferma ses
portes en 1766.
[10] Monteilhet écrit que vers
1650, deux Dugard travaillaient comme écuyers ordinaires de la Grande écurie:
l’un prénommé Martin et l’autre Bonaventure. Toujours selon Monteilhet, Dugard de Longpré,
fils de Bonaventure, aurait dirigé le manège de la rue de l’Université entre
1680 et 1716. A la mort de Dugard de Longpré, c’est
son petit-fils Léon qui aurait pris la succession Léon étant mort à son tour en
1730, c’est son frère cadet, le chevalier Philippe Dugard, qui aurait pris le
relai. Monteilhet semble se tromper à la
fois sur les générations et sur les noms des Académies
impliquées. D’après la généalogie communiquée par Alain Braillon, il faudrait
partir (pour l’époque qui nous concerne ici) de deux frères: Henri du Gard, dit
le chevalier du Gard, seigneur de Suzanneville, Trénemont et
La Tour (mort en 1653) et Antoine du Gard (1604-1683), seigneur de
Suzaineville, Longpré-les-Amiens etc (1604-1683). Si nous suivons la trace des écuyers
descendants de ces deux frères, il nous faut, pour le premier (Henri du Gard),
mentionner trois de ses fils: Léon Bonaventure (1649-1730), Charles Henri (né
en 1647, qui n’est pas écuyer, mais dont le petit-fils Louis du Gard sera le
dernier écuyer de la dynastie), et Antoine Joseph (1656-1687). Quant au second
(Antoine du Gard), il
eut un fils écuyer: François du Gard de Longpré, seigneur de Suzanneville,
Longpré etc. (1631-1702), et dont deux fils suivront la carrière de leur père:
Jacques (1678-1714) et François du Gard, seigneur de Suzanneville, Longpré, la
Loutinière, Warvillers et Auteuil (1672-1743). Le Dugard de Longpré qui aurait,
selon Monteilhet, dirigé de 1680 à 1716 le manège de la rue de l’Université
semblerait donc en fait être François du Gard de Longpré, lequel travaille, de
1667 à 1687, dans l’Académie de la rue de Seine, puis, de 1687 jusqu’à sa mort
en 1702, à l’Académie de la rue de l’Égout.
François du Gard de Longpré n’était pas non plus, comme l’affirme
Monteilhet, le fils de Bonaventure Dugard mais le cousin de Léon Bonaventure
(1649-1730), fondateur des Académies de la rue de l’Université et de Verneuil.
Monteilhet relève correctement que les fils de [Léon] Bonaventure ([Jean] Léon
Dugard et [Jacques] Philippe prendront le relai de
leur père à la mort de celui-ci. Le troisième fils, Charles Henry, n’est pas
mentionné par Monteilhet, bien qu’il eût lui aussi collaboré dans cette
entreprise avec ses deux frères.
C’est Léon Bonaventure (1649-1730) et non Jean Léon Bonaventure (1700-1746) qui fut écuyer de
la Grande écurie. Quant au dénommé Martin, il
ne semble pas avoir appartenu à la famille des du Gard, si tant est qu’il eût
existé. Aucun Martin ne figure en outre parmi les registres
des écuyers ordinaires (ni même cavalcadours) des Grandes écuries de
Versailles.