Les chevaux de Baucher
© Alain Fabre 2003
[Actualisé le 31/07/13]
Observations
de L’Hotte (1905) sur les chevaux possédés par Baucher
à Lyon en 1849 :
Q En même temps que Partisan, Baucher avait possédé et monté en public Capitaine, Neptune
et Buridan. C’est avec ces quate chevaux qu’il fonda
sa réputation. Ils étaient de natures dissemblables, deux surtout;
c’était Partisan, le noble pur sang, et Buridan, lourd et épais carrossier,
sans énergie. Aussi, pour prouver que ses moyens de dressage pouvaient être
appliqués victorieusement à tous les chevaux, quelle que fut leur nature, ce
sont ces deux chevaux que Baucher fit venir et monta
à saumur, lorsqu’en 1843 il fut appelé à faire
connaître et à enseigner sa méthode à l’école de cavalerie. f (pp.
118-119)
N.B. Les observations de L’Hotte sur les chevaux de Baucher
contiennent d’importantes lacunes. Il est certain que l’auteur de Un officier de cavalerie avait
l’intention de les combler, mais le temps lui a manqué. L’ouvrage de L’Hotte
est ainsi conçu qu’en tête de chaque chapitre, nous en trouvons le plan résumé,
voici le début de celui du chapitre IX, qui nous intéresse ici: QBaucher (suite). – Portrait et travail de ”Kléber”, ”Turban”, ”Bloc”,
”Picarde”, ”Shandor”, ”Stades”, ”Partisan”,
”Capitaine”, ”Neptune”, ”Buridan”, ”Géricault” […], f.
Et le texte de L’Hotte commence ainsi: Q Pour préciser, en partie au moins, les difficultés équestres abordées par Baucher, ainsi que les divers mouvements de jambes, tirés
pour la plupart de son imagination, qu’il faisait exécuter à ses chevaux, je
vais indiquer ce que présentait de plus particulier le travail propre à chacun
des chevaux qu’il possédait à Lyon en 1849. Je donnerai, en même temps,
quelques détails sur chacun d’eux f. Le texte de L’Hotte suit bien l’ordre de présentation des chevaux promis
par le résumé du chapitre, mais l’auteur n’a pas eu le temps de revenir sur son
texte et de le compléter, de telle sorte que dans le tableau suivant, que j’ai
construit en suivant de près le texte de L’Hotte, les cases correspondant à
Capitaine, Neptune et Buridan son restées vides et celle qui correspond aux
particularités du travail de Géricault est elle aussi vide. L’Hotte pourtant
dit très clairement que c’est avec quatre chevaux (Partisan, Capitaine, Neptune
et Buridan) que Baucher fonda sa réputation, ce qui
ne peut que signifier que L’Hotte a laissé son travail inachevé et que, s’il en
avait eu le temps, il se serait certainement expliqué en détail à propos des
trois derniers.
À la page 14 de sa Méthode d’équitation (Œuvres complètes, édition de
1859), Baucher écrit :
« C’est mon travail au Cirque qui, seul, leur avait dessillé les yeux
[Baucher fait ici allusion à ses détracteurs]. Il est
probable que sans les exercices publics de mes chevaux, tels que Partisan, Neptune, Capitaine, Géricault,
Buridan, Topaze, Mamhoud, Haydée,
Maiflay, Bloc, Stades, La Picarde, Hasting,
Passetemps, Godolphin, Robert, La Béarnaise, Lebouffe, Turban, Sandor, Kleber,
Blacknick, Nigel, Zamba, Cherkesse, Barbarina, je serais encore enfoui, inconnu
et sans écho, au fond de l’un des manéges de la
capitale. Tous ces chevaux n’ont pas coûté plus de cinq cent francs en moyenne ;
leurs défauts de perfection rendaient plus difficile encore le point d’éducation
auquel ils ont été amenés ».
Je remercie Monsieur Dominique Ollivier d’avoir attiré mon attention sur
cette liste, qui manque à plusieurs éditions et rééditions du texte fondamental
de Baucher.
NOM DU CHEVAL |
DESCRIPTION PHYSIQUE |
PARTICULARITES DE SON TRAVAIL |
BLOC |
Bloc était de robe grise,
et intitulé cheval de labour. Il avait l’aspect commun, de longs poils aux
jambes et représentait assez bien le cheval de trait léger. L’encolure était
courte, mais bien greffée, le rein long, les jarrets étroits, mais les
hanches étaient puissantes |
- Les rênes étant nouées sur
l’encolure, le cheval, sans l’aide de la main, se présentait dans une
position correcte, en exécutant les changements de direction, les diverses
pirouettes, les changements de pied aux deux temps - En marchant au pas, les
membres antérieurs, complètement étendus, restaient un instant au soutien
avant de toucher le sol - Ayant une épaule au soutien, Bloc s’enlevait sur les hanches et,
dans cette position, lançait un violent coup de sabot, avec la jambe
primitivement levée. Aussitôt que le devant avait regagné le sol, le même
mouvement se répétait |
Lourd et épais carrossier, sans
énergie |
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(Voir plus bas les commentaires d’Armand Charpentier) |
GÉRICAULT |
Quant à
Géricault, il avait désarçonné maints cavaliers, et des plus réputés […].
Mais ce qui devient merveilleux, c’est de monter un pareil cheval, aux
lumières, au bruit d’un orchestre et des applaudissements d’un public
nombreux, le ving-neuvième jour de son dressage, et
sans qu’il manifeste la moindre volonté de se défendre, sans même faire une
faute |
--- |
KLÉBER |
Gris clair, était haut sur
jambes, avait de la taille, du sang, l’encolure bien greffée et un beau port
de queue, d’où ressortait un certain éclat. Mais, en réalité, c’était une
rosse. Baucher l’avait trouvé, relégué dans le coin
d’une écurie d’un manège de Lyon. Personne ne voulait plus le monter à cause
de la défectuosité de ses allures et de son peu de solidité […] Kléber était entier ; le
voisinage des juments causait chez lui une grande surexcitation ; mais,
une fois entre les jambes de Baucher, il semblait
indifférent à leur approche |
- Balancer des hanches à droite
et à gauche en marchant, les épaules suivant une même direction - Pirouettes renversées sur
trois jambes, le membre levé se présentant dans sa plus grande extensiom - Pirouettes ordinaires, avec
enlevé du devant, l’appui se faisant alternativement sur l’une et l’autre
épaule, le membre opposé restant au soutien - Transition, sans temps
d’arrêt, du galop en arrière au passage - Galop en arrière sur trois
jambes, une jambe de dedans restant au soutien |
NEPTUNE |
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Bai-châtain, avec une étoile en
tête, pur sang, avait une construction légère et des formes élégantes. La greffe
de l’encolure, le port de queue ne laissaient rien à désirer. Le cheval, dans
son ensemble, était des plus séduisants. Venu d’Angleterre, il avait été payé
un gros prix à son arrivée en France. Lorsque, pour 500 francs, Baucher s’en rendit acquéreur, le cheval avait été
perverti dans les allures, autant que dans son caractère |
- Transition du piaffer
précipité et près de terre au piaffer le plus noble, lent, élevé et
merveilleusement rythmé - Trot en arrière - Arrêt instantané, avec une
épaule au soutien, en marchant de deux pistes - Balancer du devant - Reculer au galop - Changements de pied au temps C’est sur Partisan que Baucher pratiquait tout
d’abord ses essais, et le maître me disait que, si ce cheval, bien âgé
lorsque je l’ai connu et monté, avait le don de la parole, il étonnerait
fort, en faisant connaître les moyens, si divers, auxquels il avait été
soumis (Voir, pour comparaison, les
commentaires de Jules Janin sur Baucher et Partisan et ceux recueillis par Armand Charpentier, ci-dessous) |
PICARDE |
Baie, commune, de taille
moyenne, ne révélait aucun degré de sang. La machoire
avait présenté des résistances particulières. Pour arriver à son écartement, Baucher, étant à Trieste, avait eu recours à la langue
serpentine, et trois mois avaient été nécessaires pour bien l’obtenir |
- Succession de pirouettes
renversées et ordinaires au galop et au passage - En marchant au pas, les
membres antérieurs s’élevaient vivement et frappaient fortement le sol à
chaque foulée |
SHANDOR |
Lorsque Baucher
était en Autriche, à Vienne, le comte Shandor lui
avait donné ce cheval. Il avait le cachet oriental, était entier, gris
truité, de taille moyenne et de nature un peu molle |
- Transition du piaffer, absolument
sur place, au piaffer en avançant et en reculant - Piaffer dépité - Reculer, en exécutant, à
droite et à gauche alternativement, un quart de pirouette renversée, les
épaules suivant une même direction - Succession de pirouettes
renversées à droite et à gauche, sur trois jambes et en avant, la jambe levée
posant à terre dans toute son extension - Trot avec grande élévation et
extension des plus énergiques des membres antérieurs - Changements de pied au temps - Pirouettes au galop,
exécutées avec rapidité, le devant ne touchant le sol que deux ou trois fois
dans une pirouette complète |
STADES |
Baie, de taille moyenne, bien
construite, mais ayant très peu de sang. Atteinte du vertigo, la jument
présente pendant deux ans des difficulté. Au début,
elle secouait la tête par côté, avec violence. Au cours du dressage, les
attaques de vertigo disparurent et les mouvements de tête finirent par ne
plus se produire que rarement. Achetée 150 francs, elle fut vendue à Paris
6,000 francs et mourut peu de temps après. |
De tous les chevaux de Baucher, Stades
avait le travail le plus particulier, on pourrait dire le plus riche - Piaffer-balancer, continué en
appuyant. Cet air, exécuté avec une rare perfection, réunissait trois
difficultés : la cadence et l’élévation du piaffer, le balancer, la
prédominance des forces décidant la marche par côté - Ronds de jambes en avançant.
Mêmes mouvements en reculant, chaque pas de reculer étant précédé de
l’extension complète du membre qui exécutait, ensuite seulement, son mouvement
circulaire - Étant de pied ferme,
déplacement en arrière, puis en avant, d’un bipède diagonal, l’autre diagonal
se mobilisant sur place - Étant de pied ferme,
rapprochement des pieds de derrière jusqu’à 20 centimètres environ des pieds
de devant, et prise d’un camper extrême, en partant de cette position - Changements de pied au temps
des plus brillants De tous les chevaux qu’a
possédés Baucher, Capitaine, seul, les a exécutés avec autant d’éclat. Mais, en
raison de l’énergie qu’elle mettait dans les changements de pied, Stades ne pouvait, sans perdre la
légèreté, en faire plus de cinquante de suite au temps, tandis que le pur
sang Turban en faisait, comme je
l’ai dit, facilement deux cents |
TURBAN |
Alezan doré, pur sang, de petite
taille. Ses difficultés découlaient de son tempérament très nerveux. Il était extrêmment chatouilleux |
- Piaffer dépité en se campant.
Le cheval exécutait cette sorte de trépignement avec une extrême rapidité, et
une violence telle, que la poussière couvrait le cavalier - Changements de pied au temps,
du devant, étant campé - Toute une reprise, comprenant
les pirouettes sur les hanches, en changeant de pied au temps. Turban faisait facilement, sans
interruption, deux cents changements de pied au temps |
TRAVAIL DE
« PARTISAN » SELON ARMAND CHARPENTIER (1868-1948) – Extrait de « Les Soirées de l’Étrier, 1946 :
« Partisan » - Pur sang, bai brun, 7 ans, acheté le 10 août 1837
débute au Cirque des Champs-Élysées le 11 juin 1839 (Près de deux ans de dressage) :
PREMIER TRAVAIL (op.cit., p.71) :
Entrée au galop,
temps d’arrêt sur trois jambes
Trot en avant et en arrière
Épaule en dedans et passage très
cadencé
Balancer au passage
Pirouettes sur les jambes de
devant et de derrière,
au pas
Galop sur de petits cercles
avec changements de pied
Changements de pied tous les deux
temps
Changements de pied au temps
Travail complet sur les hanches,
au galop
Pirouettes sur les jambes de
devant
et derrière sur trois jambes, au galop
Marche directe sur trois jambes
Balancer sur trois jambes
Galop en avant et en arrière
Quatre pas de côté suivis d’une
demi-pirouette
et d’un balancer de la croupe
Piaffer balancé,
temps d’arrêt sur trois jambes
Piaffer accéléré,
temps d’arrêt sur trois jambes
Changements de pied au temps,
pirouettes sur les jambes de derrière
Mouvement de deux jambes
par la transversale en place
Reculer cadencé
Sortie
SECOND TRAVAIL (op.cit., p. 72) :
Entrée au galop,
temps d’arrêt sur trois jambes
Reculer
Travail sur les hanches au passage
Trois changements de pied tous les deux temps,
et cinq au temps
Piaffer en avant et en arrière sans rênes
Trot étendu
Changements de pied tous les deux temps
et au temps, alternativement
Pirouettes sur les jambes de derrière
avec une jambe de devant en l’air
Pirouettes au piaffer précipité
Balancer sur trois jambes
Galop en arrière sans rênes
Piaffer lent puis précipité
Sortie
TRAVAIL DE
« CAPITAINE » SELON ARMAND CHARPENTIER
(1868-1948) – Extrait de « Les Soirées de l’Étrier, 1946 :
« Capitaine » -
Cheval alezan doré, 8 ans, acheté le 9 septembre 1839, débute au Cirque des
Champs-Élysées le 10 juin 1840 (op.cit., p. 73).
Entrée au pas naturel,
l’encolure extrêmement basse
Passage instantané de cette position abandonnée
à un rassembler complet
Trot serpentin
Trot étendu
Petits cercles au galop,
avec de fréquents changements de pied
Changements de pied tous les deux temps
Changements de pied au temps
sur des cercles de petite dimension
Galop précipité
et temps d’arrêt sur trois jambes
Pirouettes ordinaires avec changements de pied
sans changer la position propre au mouvement
Mouvements alternés d’une des jambes de devant, en place
Piaffer et pesades, alternativement
Piaffer très haut et très cadencé
Sortie
QUELQUES AUTRES CHEVAUX DE
BAUCHER:
1843 : ROBERT DE NORMANDIE L'Indépendant.Furet des théâtres_1843_8 juin.pdf
1844 : MAYFLY : année de son
« lancement » L'Indépendant.
Furet des théâtres_1844_26 septembre.pdf
1845 : autres mention
de MAYFLY L'Argus_1845_8
mai.pdf, L'Argus_1845_23
janvier.pdf
1845 : PASSE-TEMPS L'Argus_1845_23
janvier.pdf
1846 : BOUFFE L'Argus_1846_6
août.pdf